Autodafé pour protéger les autochtones

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Près de 5 000  livres ont été retirés des bibliothèques scolaires d’une trentaine d’écoles d’Ontario au Canada. Ils ont été jugés discriminatoires envers les « Premières nations », c’est-à-dire les Indiens. Attention cependant, il ne faut plus dire « Indiens » !.

Au Canada, dans une démarche de réconciliation avec les autochtones, le conseil scolaire catholique (CSC) Providence a organisé une grande purge littéraire. Composé de membres du conseil scolaire ainsi que de descendants des « Premières nations » – comme Suzy Kies, autochtone « gardienne du savoir » et coprésidente de la Commission des peuples autochtones du Parti libéral du Canada – un comité a été créé dans le but d’analyser et de sélectionner les livres de jeunesse traitant des « Premières nations » en vue de les retirer des bibliothèques scolaires.

Radio Canada, qui a pu avoir accès au document de 165 pages référençant les œuvres de jeunesse posant problème aux autochtones, rapporte qu’au total 4 716 livres ont été retirés des trente bibliothèques du conseil scolaire catholique Providence.

Au bûcher !

Suite à la publication du rapport sur les livres à faire disparaître des écoles, le CSC Providence a lancé le projet « Redonnons à la terre ». Il avait pour intention de « faire un geste d’ouverture et de réconciliation en remplaçant les livres de nos bibliothèques ayant un contenu désuet et véhiculant des stéréotypes néfastes envers les « Premières nations », métis et Inuits… ». Ainsi dans le cadre de ce « projet », une cérémonie de « purification par la flamme » a eu lieu dans une des écoles en 2019 pour brûler une trentaine de livres interdits. Un autodafé, certes, mais positif car les cendres récupérées ont servi d’engrais pour planter un arbre… Dans une vidéo destinée aux élèves, la « gardienne du savoir » Suzy Kies explique que par cette cérémonie « nous enterrons les cendres de racisme, de discrimination et de stéréotypes dans l’espoir que nous grandirons dans un pays inclusif où tous pourront vivre en prospérité et en sécurité », une vidéo qui explique aux enfants qu’il est donc tout à fait normal d’organiser des autodafés à l’école, un évènement paradoxal pour un lieu d’apprentissage et de culture.

Tous les établissements du CSC Providence devaient allumer leur propre petit bûcher mais « grâce » au Covid, les feux de joie ont été reportés. Finalement, afin d’éviter un tollé chez les parents et enseignant, le CSC a décidé qu’il était préférable de seulement détruire ou recycler les livres restant…

les cendres de racisme, de discrimination et de stéréotypes » servent désormais d’engrais.

Mais pourquoi ?

Les ouvrages qui ont été jugés indésirables par le comité sont pour la plupart des livres de jeunesse que nous avons tous dans nos bibliothèques, des piliers de la littérature jeunesse francophone : Astérix et ObélixTintin et Lucky Luke entre autres. Mais pourquoi détruire ces classiques ? Parce que toutes ces œuvres ont été jugées comme désuètes et véhiculant des stéréotypes négatifs sur les « Premières nations ». Suzy Kies, encore elle, dénonce la manière dont sont représentés les autochtones dans la littérature pour enfants « pas fiables, paresseux, ivrognes, stupides… »
Par exemple, pour Tintin en Amérique, les reproches sont : un « langage non acceptable », des « informations erronées », une « présentation négative des peuples autochtones » et une « représentation fautive des autochtones dans les dessins ».
Pour Lucky Luke c’est le « débalancement de pouvoir » entre les blancs et les autochtones, entre autres qui justifie son retrait des rayonnages.

Cependant ce ne sont pas que des BD ou des romans pour enfants qui sont retirés des étagères et recyclés (dans le meilleur des cas). Des encyclopédies, deux biographies de Jacques Cartier et une d’Étienne Brûlé ont été victimes de cette censure. Selon le comité, les trois biographies ont été supprimées car les informations contenues étaient « désuètes » et « fausses ».

Justin Trudeau, l’actuel Premier ministre, et Suzy Kies en 2018.

Retournement de situation !

Suzy Kies, à qui nous devons la proposition d’autodafé, était depuis 2016 la coprésidente de la Commission autochtone du parti libéral du Canada, le parti de Justin Trudeau l’actuel Premier ministre. Selon le site du PLC, Kies serait « une autochtone urbaine de descendance abénakise et montagnaise » mais aurait également des « connaissances approfondies sur plusieurs différentes nations autochtones ».

La « gardienne du savoir » a même détaillé ses origines lors d’une interview avec Radio Canada : son père est Luxembourgeois tandis que la famille de sa mère est issue « de plusieurs communautés ». Cela justifierait ses « connaissances approfondies » sur plusieurs « Premières nations », sauf qu’il n’existe aucune preuve de ses origines autochtones ! L’unique ancêtre autochtone qu’on lui trouve est Marie Manitouébéouich, une Algonquine du XVIIe siècle qui se trouve être une ascendante commune à beaucoup de Canadiens français… Un comble pour quelqu’un qui brûle des livres sous prétexte d’appropriation culturelle…

Face à la mise en lumière de ses origines, Kies a préféré démissionner de son poste à la Commission autochtone du parti libéral du Canada afin de ne pas porter préjudice au parti.

Contexte électoral.

Cette histoire d’autodafé, même si elle date de 2019, fait surface en pleine campagne politique pour les élections législatives canadiennes. Tous les politiciens en lice pour le poste de Premier ministre ont pu donner leur avis. Si tous « personnellement » condamnent l’autodafé, les réponses restent ténues afin de ne pas froisser les « Premières nations ».

Photos CC via WikimédiaCommons, facebook.com/IPC.CPA et Capture d’écran CSC Providence.