En refusant le pacte mortifère de Marrakech, les Flamands ont indiqué la marche à suivre aux Européens. Pourquoi cette réaction dans un pays si tranquille ? L’immigration est en train de détruire la Belgique et les Flamands ne veulent pas mourir avec elle.

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Dans les colonnes de l’excellent Figaro Vox, le sénateur belge Alain Destexhe du Mouvement des réformateurs, explique la vraie situation de la Belgique et les raisons du rejet du pacte de Marrakech. Un extrait de son entretien à retrouver sur le site du Figaro Vox.

FIGAROVOX.- Pourquoi y a-t-il une crise autour de la question de l’immigration en Belgique?

Alain DESTEXHE.- Le plus grand parti politique du Royaume, la NV-A (Nouvelle Alliance Flamande, un parti «nationaliste» de droite), a refusé que le Gouvernement belge signe le «Pacte migratoire» de l’ONU. Dès lors, le Premier ministre, Charles Michel, n’avait plus de majorité au Parlement. Il a tenté de gouverner avec une minorité, mais après quelques jours, il a été contraint de présenter sa démission.

Que reprochait la NV-A au Pacte de Marrackech?

D’abord, elle avait de sérieux doutes quant au caractère «non contraignant» du Pacte, étant donné que les signataires «s’engageaient à honorer les engagements contenus dans le Pacte». Ensuite, elle craignait le fait que le Pacte fasse partie de la «soft law», de la coutume internationale et donc que des ONG, des juges belges, ou la CEDH puissent l’invoquer. Enfin, et surtout, elle rejetait une partie du texte: la non-distinction claire entre migration légale et illégale, l’obligation de tenir compte de la culture des migrants par exemple dans les soins de santé (ce qui pourrait signifier l’obligation de femmes médecins pour soigner les femmes), la protection absolue des enfants et donc l’interdiction de placer en centre fermé une famille pour la rapatrier, même en dernier recours, etc.

Pourquoi la question de l’immigration a-t-elle une telle importance en Belgique?

Par rapport à sa population, la Belgique a reçu beaucoup plus d’immigrés que ses voisins, y compris la France. Dans les années 2000, le solde migratoire a été quatre fois plus important en Belgique qu’en France ou en Allemagne! Les problèmes qui en résultent (absence d’intégration, communautarisme, développement de l’islamisme) ont été niés ou minimisés.

Le Vlaams belang et le Rassemblement national sont des partis très liés par une affinité politique et personnelle importante. Ici Marine Le Pen participe à une manifestation du Vlaams belang en 2018 à Bruxelles.

Par rapport à sa population, la Belgique a reçu beaucoup plus d’immigrés que ses voisins.

Le problème est-il plus aigu encore en Belgique qu’en France?

Dans les années 2000, une politique d’ouverture a été pratiquée en Belgique: facilitation du regroupement familial (qui constitue désormais 50% de l’immigration), opérations de régularisation des clandestins, tolérance vis-à-vis de l’islamisme, naturalisations en masse… En une vingtaine d’années, presque un million de personnes ont été naturalisées sur une population de dix millions. Beaucoup ne sont pas intégrées. Imaginez que cinq ou six millions de personnes accèdent à la nationalité française sans que leur soit demandée une intégration économique ou culturelle à la société française: cela provoquerait un tollé. Pourtant, c’est, proportionnellement, ce qui s’est passé en Belgique.

A quel point Bruxelles est-elle aujourd’hui une ville multiculturelle?

Bruxelles compte déjà probablement 30% de musulmans. En quelques années à peine, les Belges d’origine sont devenus minoritaires à Bruxelles. En soi, ce ne serait pas un problème si l’intégration (en Belgique, on ne parle plus d’assimilation depuis longtemps) avait eu lieu, mais la plupart des indicateurs montrent que ce n’est pas le cas. Prenons des. À chaque élection en Turquie, Erdogan et son parti l’AKP réalisent un score d’environ 10% supérieur parmi les Belgo-Turcs qu’en Turquie. La plupart, issus de la seconde ou troisième génération d’immigrants, sont pourtant nés en Belgique. La dérive autoritaire et islamiste d’Erdogan ne suscite aucune protestation chez les nombreux élus turcs de Belgique parmi lesquels des députés et un maire, ancien ministre. Chez les musulmans, l’homophobie et l’antisémitisme restent très répandus. Les différentes communautés vivent de plus en plus repliées sur elles-mêmes.

 


Premiers Européens à le faire, les Flamands sont montés en masse dans leur capitale Bruxelles pour manifester leur hostilité au pacte de Marrakech. Lire notre post en cliquant sur la photo.

Le Parlement régional bruxellois, où les Belges d’origine étrangère sont en passe de devenir majoritaires, vote des résolutions sur la Palestine ou les Rohingyas de Birmanie mais ne s’intéresse pas à la situation des droits de l’Homme en Turquie. Dans les écoles primaires publiques bruxelloises, plus de 50% des enfants suivent le cours de religion musulmane. On assiste à l’émergence d’un nouveau modèle de multiculturalisme bruxellois, très problématique de mon point de vue pour le socle de valeurs communes, mais le discours officiel célèbre cette diversité et le «vivre ensemble». Le sursaut provoqué par les attentats terroristes est bien loin. Le terrorisme est combattu, mais l’islamisme qui est le plus souvent non violent progresse dans une indifférence quasi générale. Il n’y a pas non plus d’études comme celles de l’Institut Montaigne en France qui tenteraient de mesurer le degré d’intégration. Le monde politique et médiatique préfère ne pas voir les problèmes.

Cette situation est-elle inquiétante?

Ce modèle diversitaire devrait être étudié objectivement, car avec la poussée migratoire que connaissent la plupart des grandes villes d’Europe de l’Ouest, il pourrait s’imposer progressivement, un peu partout, à travers des élections démocratiques. Comme on le sait, la démocratie c’est le pouvoir du nombre, le pouvoir du peuple, qui ne va pas forcément dans le sens des valeurs libérales ou des notions de laïcité ou de neutralité de l’État (notions parfois peu acceptées par certains immigrés).

Scène de rue à Molenbeek, bourg de Bruxelles et capitale européenne du terrorisme islamique.

La démographie est, ici, une question centrale. Bruxelles est devenue la seconde ville la plus cosmopolite du monde après Dubaï, sans en avoir la richesse. Autrefois, la ville la plus riche du royaume, elle est en voie de paupérisation suite aux vagues migratoires. À Bruxelles, 90 % des allocataires sociaux sont d’origine étrangère. Cela devrait faire réfléchir ceux qui prônent des frontières ouvertes tout en dénonçant la montée des inégalités.

Comment cette évolution est-elle perçue par les autres régions de la Belgique?

Ce qui se passe à Bruxelles sert de repoussoir à une partie de la Flandre. Sans sombrer dans l’extrême droite, la NV-A a pris conscience des dangers de la société multiculturelle et du besoin d’identité, un thème central dans son discours. Elle a d’ailleurs réussi à attirer quelques jeunes femmes éminentes de la société civile d’origine étrangère mais qui refusent cette évolution vers le multiculturalisme.

Retrouvez l’intégralité de la tribune sur le Figaro Vox en cliquant ici.
Photos CC de Foam via Flickr et DR.